Litak du clan de la Forêt Sombre - Chapitres LXXVII à LXXX

 

LXXVII

— Ils attaquent !
L'appel venait de Trogak. Sharle se précipita vers l'amont. Les rafleurs avaient, eux aussi, perçu le message du Hurleur, du moins, ce qu'ils pouvaient en percevoir : impressions étranges de danger imminent, angoisse de mort, sensation oppressante. Ils avaient en outre entendu, eux aussi, le son du cor et ce message-là était on ne peut plus explicite : des troupes arrivaient derrière eux. De chasseurs, ils allaient bientôt devenir gibier et tous connaissaient les lois de Valfond concernant les rafleurs. Ils n'avaient donc plus le choix. Ils devaient vaincre sur le champ, ou mourir, de la main des défenseurs, ou de celle de la justice de Jehan. C'est donc avec la rage de ceux qui n'ont plus rien à perdre qu'ils attaquaient cette fois-ci.

Urog voulut envoyer la moitié de ses forces aider Sharle, mais une sonnerie de cor retentit, bien plus proche celle-là que celle des renforts. Et il connaissait parfaitement la signification de ces quelques notes : la charge pour les armées des Belles Landes. Halbair appelait ainsi ses alliés à le soutenir dans cette dernière attaque. Il entendit le chef des soldats haranguer ses troupes. Quelques instants plus tard, les soldats poussèrent, eux aussi, un cri de guerre et ils se mirent en marche, lances pointées en avant.

LXXVIII

Sharle arriva sur la ligne de combat, épée à la main. Il n'eut pas le temps d'évaluer la situation, les rafleurs étaient déjà au contact. Sharle se félicita d'avoir placé les rochers au milieu du passage. Les rafleurs devaient se diviser en plusieurs lignes, ce qui gênait leurs mouvements et facilitait la tâche des défenseurs. Néanmoins, leur force était le nombre. Ceux qui se trouvaient en seconde ligne poussaient leurs camarades vers l'avant et le Général comprit que jamais, ils ne pourraient endiguer une telle marée humaine. Les frondeurs se mirent en action, mais ils ne faisaient que retarder la marche en avant inexorable des rafleurs. Une brèche fut percée sur le flanc droit, contre la falaise. Les petits fantassins se ruèrent sur les infiltrés et les frondeurs effectuaient un terrible tir de barrage, mais en vain. Une seconde brèche au centre et les lanceurs de pierre durent diviser leur concentration de tir, ainsi que leur efficacité.
Radgog et Farabert se montraient toujours aussi efficaces, mais ils ne parvenaient pas à endiguer le flot ininterrompu d'assaillants.

LXXIX

Urog et ses guerriers virent le mur des soldats approcher. Étrangement, les rangs n'étaient pas aussi compacts qu'aux assauts précédents. Urog lança un premier rocher lorsque les hommes furent à portée. Il comprit aussitôt pourquoi les hommes étaient aussi espacés : dès qu'il lâcha le rocher, les soldats s'écartèrent de la zone d'impact en se resserrant de chaque côté. Un tir pour rien, la masse des hommes avala le rocher et continua sa progression.
On en lance deux à la fois !
Il attrapa aussitôt un second rocher, imité par Corg. Derrière eux, Bratak et Mallog se tenaient prêts à effectuer le prochain tir. Urog et Corg firent des victimes, mais beaucoup moins qu'espéré. Les hommes avaient laissé assez d'espace entre eux pour esquiver les deux rochers. Seuls les moins prompts à s'écarter furent tués. Aussitôt après leurs aînés, les deux jeunes guerriers effectuèrent leurs lancés et ils réalisèrent plus de dégâts, car ils n'avaient pas laissé le temps aux hommes de se réorganiser. Martog et Darlak effectuèrent leur tir, pendant que Corg et Urog se tenaient prêts à continuer. Les pertes humaines furent importantes, mais les orques avaient épuisé leurs munitions. Les hommes chargèrent comme des furieux et le corps à corps devint inévitable.

LXXX

Litak avait repris quelques forces. Elle se tenait en arrière, pour protéger les futures mères et les plus petits. Un premier rafleur parvint jusqu'à elle sans se rendre compte qu'elle était armée. Son erreur lui fut fatale. Le stress de la situation, l'emballement de son cœur finirent de la remettre d'aplomb. Elle prit l'épée de sa victime et la tendit à une jeune fille, qui la saisit incrédule. Lui faudrait-il réellement s'en servir ? Un second rafleur parvint jusqu'à elle. Litak s'interposa, mais elle avait affaire à un vétéran de la guerre et elle se trouva vite en difficulté. L'homme la poussa d'un coup de pied, elle tomba à la renverse. Elle n'avait pas encore touché le sol que l'homme avait déjà levé son épée, prêt à frapper. Il ne le fit jamais, la jeune fille l'avait transpercé d'un coup d'estoc. Il s'écroula et Litak félicita la future mère :
Bien ! C'est comme ça qu'il faut faire !
Elle récupéra l'épée du mort et la tendit à une nouvelle orque, qui l'empoigna aussitôt. Ayant assisté à toute la scène, elle avait compris que les rafleurs n'étaient pas venus jusqu'ici pour faire des prisonniers.

 

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