Litak du clan de la Forêt Sombre - Chapitre LXX
LXX
Elle se déplaça aussi
vite qu'elle le pouvait, en remontant la vallée. Elle paniquait, car
elle ne savait pas où trouver de l'aide. Elle scrutait l'horizon à la
recherche d'une éventuelle lueur qu'elle ne trouvait pas. Elle arrivait
déjà au Col des Dents et elle s'apprêtait à rebrousser chemin, lorsque
enfin, sur l'autre versant, elle repéra un campement : Les rescapés du
clan et une petite troupe de soldats de Valfond, principalement des
archers, mais aussi quelques orques. Elle se précipita vers eux,
cherchant qui serait en mesure de la percevoir. Elle appela Arkog,
Manouba, mais c'est Lazaée qui réagit la première. Litak lui effleura le
bras et elle sursauta. Les autres avaient, eux aussi, perçu quelque
chose d'étrange, mais pas aussi nettement. La demi-orque tenta de lui
parler par les gammes, mais elle constata rapidement qu'elle n'y
parviendrait pas. Elle décida donc de lui dire le plus distinctement
possible qu'ils étaient en danger plus loin en aval et qu'ils auraient
besoin d'aide. Elle essayait de visualiser ce qu'elle disait.
La jeune fille était confuse.
— Litak, c'est toi ?
— Oui !
Elle appela aussitôt Urtak :
— Litak est là, c'est comme l'autre soir, elle est là et elle essaye de me dire quelque chose !
Le
guerrier se précipita. L'histoire qu'on lui avait racontée était trop
étrange pour qu'en temps normal, il y accorde crédit, mais il ne
risquait rien à écouter la petite.
— Qu'est-ce qu'elle dit ?
— Ils sont en danger !
Les membres du clan s'étaient rapprochés.
— Où sont-ils ?
Litak
tenta de redonner la réponse, mais la petite ne comprenait pas. Par
dépit, la demi-orque effleura le bras d'Arkog et à sa réaction, elle sut
qu'il l'avait perçue.
Dans un effort terrible, elle prit le petit
couteau qu'il portait à la ceinture et le pointa dans la bonne
direction, le faisant flotter devant ses yeux.
Il ne chercha pas à comprendre :
— D'accord, nous arrivons !
Il
saisit sa hache de guerre, poussa un cri de ralliement. Tous se
précipitèrent sur leurs armes et dans les secondes qui suivirent, ils
étaient prêts à prendre la route. Litak les effleura tous en les
remerciant. Ce faisant, elle constata que certains archers réagissaient à
son contact.
Elle reprit le chemin en sens inverse et survola rapidement les hommes de Halbair. Ils s'étaient avancés en silence vers les positions de Sharle. Ils disposaient aussi d'archers, dont quelques-uns avaient réussi à se positionner au-dessus des archers de Valfond qui ne les avaient pas repérés. Elle devait intervenir, mais elle ne savait que faire. Peut-être pouvait-elle agir sur les flèches ? Elle se positionna en amont des archers de Halbair et tenta de hurler "NON ! ", comme elle l'avait déjà fait par deux fois, mais sans succès. Les rafleurs encochèrent leurs premières flèches et elle imagina les corps criblés de traits. Cette image lui était insupportable. "NON ! " Elle crut qu'elle avait à nouveau échoué, mais le peu d'effet qu'elle avait eu sur les flèches avait suffi pour déséquilibrer un des rafleurs qui fut entraîné vers le précipice. Dans sa chute, il hurla et emporta son camarade qui se trouvait juste en dessous.
Les soldats de Valfond furent avertis et décochèrent leurs flèches avec vitesse et précision, résultat d'un entraînement poussé. Les rafleurs tombèrent ou refluèrent pour les plus chanceux.
Elle rejoignit Sharle :
— Les renforts arrivent. Ils sont au Col des Dents. Il faut tenir !
Elle s'éloigna à nouveau vers l'aval afin de repérer les soldats des Belles Landes.
Il ne leur restait plus qu'un dernier virage à franchir pour arriver au
contact. Urog avait disposé l'essentiel de ses forces sur les côtés,
dissimulés par les rochers et les rares buissons. Le reliquat se tenait
face au danger, l'arme au poing. Le subterfuge avait une chance de
fonctionner, mais elle jugea qu'elle pouvait participer un peu à la
déstabilisation de ces hommes, dont elle sentait qu'ils n'étaient pas
venus là de gaieté de cœur. Elle parcourut les rangs des Belles Landes
en effleurant le plus de soldat possible, tout en proférant les menaces
les plus horribles qu'elle puisse imaginer. Les hommes qui réagirent
commencèrent à paniquer et par effet de contagion, l'ensemble de la
troupe n'avait plus envie d'aller plus loin. Néanmoins, il s'agissait de
soldats, entraînés à obéir aux ordres et leur chef, lui, n'avait pas
envie d'arriver en retard à la bataille. Elle décida donc de le
tourmenter un peu, avec une certaine efficacité.
Elle effectuait le voyage de l'esprit depuis longtemps maintenant et elle se sentait faiblir. Elle fit encore un effort pour tirer l'épée du chef de son fourreau à sa plus grande surprise et de l'agiter sous ses yeux terrorisés. Dans un dernier effort, elle effectua un mouvement de taille que le chef esquiva en hurlant de terreur, par pur réflexe, ne récoltant qu'une légère estafilade sur le cou. Les soldats, témoins de la scène, restèrent figés, le chef, lui, était hagard. Il finit par lancer un dernier ordre : "À l'attaque ! ", puis il se mura dans le silence.
Litak n'avait plus le choix, elle devait regagner son corps. Elle n'avait aucune idée de la durée de son voyage, mais il était arrivé à son terme.
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