Litak du clan de la Forêt Sombre - Chapitre LXIX

 

LXIX

 

En milieu de journée, ils firent une halte, pour permettre à tout le monde de boire et de se reposer. Ils n'avaient malheureusement rien à manger, mais tous acceptaient d'avoir l'estomac vide, pourvu qu'ils soient libres et en sécurité. Sharle s'était assis près de Litak, heureux de trouver enfin un moment pour lui parler.
Tu crois qu'il va accepter ?
Pardon ?
Tu penses que Bratog va accepter ma proposition ?
Je crois qu'il n'a pas le choix. Il ne peut pas laisser son clan mourir de froid ou de faim sans rien faire. Tu nous sauves encore une fois, mais la difficulté, c'est que Bratog ne peut pas accepter sans offrir quelque chose en échange. Et nous n'avons plus rien à offrir.
Mais je ne demande rien !
Je sais, mais un orque ne peut recevoir de l'aide sans offrir de rembourser sa dette. C'est ainsi, c'est une question d'honneur et les orques ne plaisantent pas avec l'honneur.

Il l'observa quelques instants. Elle avait changé depuis leur première rencontre. Elle avait gagné en assurance et puis, ses nouvelles capacités avaient aussi changé la façon dont les autres la voyaient. Elle n'était jusque-là qu'au mieux, une créature étrange, au pire, un monstre. Maintenant, certains la voyaient comme une créature légendaire dotée de pouvoirs surnaturels –et d'après ce qu'il avait lui-même constaté, ils n'étaient pas loin de la vérité–, les autres, ceux qui la connaissaient depuis toujours, admiraient son courage et son abnégation pour son clan. Quoi qu'il en soit, tous lui accordaient le plus grand respect et certains des plus petits étaient en admiration devant elle.

Il la trouvait cependant soucieuse.
Que se passe-t-il ?
À nouveau, elle avait perdu le fil de la conversation :
Pardon ?
Tu sembles soucieuse.
— Je ne sais pas comment l'expliquer, mais je me sens mal, comme ce matin-là, avant que les rafleurs n'attaquent le clan, et je n'aime pas ça.
Bénobog s'approcha fort à propos :
Je perçois un trouble en toi.
Sharle n'appréciait pas la façon dont le chaman s'imposait à eux, mais il admettait qu'il pouvait peut-être aider la demi-orque, bien mieux en tout cas que ce qu'il pouvait faire.
J'ai l'impression que les rafleurs sont près d'ici. Je n'aime pas ça.
Veux-tu tenter un nouveau voyage de l'esprit ? Tu pourrais ainsi vérifier si tu peux y
parvenir sans la machine et si oui, tu pourrais déceler la présence de ces malfaisants.
Pourquoi pas. Après-tout, qu'est-ce que je risque ?
Elle s'allongea, ferma les yeux et oublia jusqu'à la présence de Sharle.

Il observa Litak se préparer. Elle respirait lentement et il pouvait voir son corps se détendre à chaque expiration. Puis, au bout de quelques instants, il la perçut. Elle avait réussi.
Tu es extraordinaire.
Merci. Je reviens bientôt.
Et elle s'éloigna.

Sharle appela ses soldats. Urog comprit que quelque chose se préparait et vint à sa rencontre.
Litak perçoit un danger. Elle n'a pas su me dire quoi, peut-être des rafleurs. Elle vient de commencer ce qu'elle appelle un voyage de l'esprit pour vérifier. En attendant d'en savoir plus, on regroupe les non-combattants au centre et ceux qui sont en mesure de se battre doivent se tenir prêts.
Les ordres furent rapidement donnés et exécutés. L'inquiétude devint palpable et l'attente pénible. Soudain, Sharle perçut Litak. Elle était revenue :
Ils sont là ! Halbair et ses hommes sont devant nous. Ils nous ont repérés et ils s'approchent. Mais nous ne pouvons pas rebrousser chemin, parce que des soldats arrivent par derrière.

Sharle enragea. Ce maudit rafleur osait venir le chercher sur ses terres. Et les soldats des Belles Landes venaient lui prêter main forte.
Combien sont-ils ?
Devant, avec Halbair, ils sont une cinquantaine. Derrière, les soldats sont une centaine.
Sharle transmettait les informations aux combattants. Urog énonça ce que tous pensaient :
Ils sont trop nombreux. Nous aurons bien du mal à les contenir.
Litak n'avait toujours pas réintégré son corps.
Je vais chercher de l'aide.

Sharle la sentit s'éloigner à nouveau. Il redoutait que les combats ne commencent avant qu'elle ne soit en mesure de se défendre. Il ordonna qu'on la déplace vers le centre du dispositif, mais Bénobog s'y opposa :
Nous risquerions de l'obliger à réintégrer son corps, ce qui l'empêcherait d'accomplir la tâche qu'elle s'est donnée. Elle représente une chance d'avoir des renforts, nous ne devons pas la gâcher.
Sharle se rangea à son avis de mauvaise grâce. Il ne voulait faire courir aucun risque à Litak, mais elle était effectivement leur meilleure chance de sortir de ce piège vivant. Il étudia la situation et ordonna à ses archers de se placer en hauteur, afin d'avoir un bon point de vue sur l'ennemi, et laissa deux de ses soldats pour la protéger. Il plaça ensuite la moitié des combattants à l'endroit le plus resserré en amont, pendant que Urog organisait la défense avec l'autre moitié des forces dont ils disposaient.

Bénobog quant à lui, demanda à tous les non-combattants qui le pouvaient d'amasser le plus de pierres possible, afin de les jeter sur leurs adversaires. Sharle doutait de l'efficacité de cette tactique, mais si cela leur donnait l'impression de pouvoir se défendre activement, au moins pourraient-ils éviter la panique.

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